Mesdames, Messieurs, chers amis, chers camarades.

Nous connaissions de longue date le DR Paul Raybaud, près d'un demi-siècle, et appréciions le médecin, son diagnostic sûr, son empathie pour ses patients, sa générosité vis à vis des plus modestes .
En rejoignant l'équipe médicale du centre médico- social de la Seyne sur Mer, il avait adapté son mode d'exercice à ses profondes convictions, convictions qu'il a conservées et défendues jusqu'à son dernier jour.

Mais pour ce dernier adieu, bien que ce soit indissociable, c'est à l'homme engagé , à l'ancien combattant volontaire de la Résistance auquel je rends hommage. Au responsable et au président d'honneur scrupuleux de notre Association Nationale des Anciens Combattants et amis de la Résistance du comité de Toulon et Du Département que je représente en cette triste circonstance.

Il nous avait passé le témoin il y a quelques années de ce qui fut une préoccupation constante de sa vie militante au sein de l'ANACR : le rappel intransigeant du rôle déterminant des Résistants durant la deuxième guerre mondiale, le souvenir du sacrifice ultime de nombre d'entre eux, leur courage, la reconnaissance de leur engagement, l'idéal, qui les avait faits se lever et prendre les armes.

Aux côtés de ce Gardien sourcilleux de l'Esprit de Résistance, nous avons pu apprécier durant ces 10 dernières années, qu'il n'avait rien perdu de son intelligence subtile, de sa vivacité d'esprit, de son goût pour le débat, de son sens politique et de son intransigeance vis à vis de toutes les dérives menaçant notre démocratie et l'indépendance de la France républicaine qu'il avait contribué avec ses camarades à libérer du joug nazi.

Pour nous qui, humblement poursuivons la voie qu'il avait tracée, sa disparition est une perte irréparable. Nous perdons plus qu'un Président, un ami très cher et respecté, , nous perdons un guide . Une des poutres maîtresses de notre fragile association qui a vu disparaître les hommes forts que nous admirions: Georges Tilman, Charles Galfré, Paul Luyton, René Nesle, André Daspres, Maurice Oustrières... qui avec Paul Raybaud ont porté haut et fort dans notre département et à Toulon les principes universels de la Résistance.

Pour nous, Paul Raybaud était une référence éthique et politique, un camarade éclairé qui avait gardé un intérêt sans faille sur la marche du monde, l'évolution de nos sociétés emportées dans la tourmente de la mondialisation et dont la belle lucidité nous manque déjà cruellement.

En bon combattant, il nous a laissé notre feuille de route; la voici:

" Les manifestations symboliques du souvenir sont nécessaires , mais insuffisantes pour offrir des repères aux jeunes générations et pourtant elles en ont grand besoin!
Depuis un demi siècle, combien de guerres avec leurs cortèges de destructions, de misères, de tortures et de violation du droit ont ensanglanté toutes les parties du monde; et pour quels résultats , si ce n'est la perspective de nouveaux conflits?
Les progrès scientifiques et technologiques extraordinaires de notre époque, communication, espace et génétique sont inexorablement assujettis aux lois de la rentabilité financière au mépris total de la condition humaine.
Le culte de l'argent et le marché mondialisé, en facilitant la fracture sociale, ont décuplé un individualisme primaire avec ses corolaires: racisme, intolérance et primauté de la violence. Evidemment, dans ce contexte, les mensonges des négationnistes, ces assassins de la mémoire, s'étalent partout et les activités des néo nazis se développent en Europe: Le danger est là, la vigilance s'impose."

Et il concluait: "Notre devoir est donc de transmettre les valeurs que Résistants et déportés , présentent sur un plateau sanglant, ces valeurs dont l'histoire montre l'universalité et la paternité. Il nous appartient de dire la vérité aux jeunes , de développer leur esprit critique, leur sens civique, d'en faire des citoyens responsables acquis à la démocratie, à la solidarité et au respect d'autrui.

C'est une tache de longue haleine qui nous oblige à mobiliser autour de nous des amis aptes à prendre notre relève après notre disparition. Aujourd'hui comme hier il faut concrétiser l'adage de la Résistance :
"Si tu tombes , un ami sort de l'ombre à ta place."
Mon cher Paul, je ne sais si mes camarades et moi même serons à la hauteur de la relève que tu appelais de tes vœux, mais sache que tant que nous en aurons l'énergie, nous resterons fidèles aux principes que tu nous a légués.